Droit fondamental des parents, des enfants, à un logement suffisant, à la dignité humaine…
Mise à jour: 13/11/2007 8:59:57
Fernand Kartheiser est le secrétaire de l'Association des hommes du Luxembourg. Inquiet de la situation des hommes divorcés au Grand-Duché, il porte un regard sans concession sur l'évolution d'une société où l'égalité entre hommes et femmes n'est pas toujours respectée. Entretien.
Entretien avec Noël Labelle
Est-ce vraiment si difficile pour un père divorcé d'obtenir la garde de ses enfants au Luxembourg?
Tout ce qui concerne la garde des enfants ici est très compliqué. Ce n'est en rien comparable avec ce qui existe en France ou en Belgique. Ici, il n'y a pas d'autorité parentale conjointe, c'est-à-dire que le parent qui n'a pas la garde est exclu de l'éducation de son enfant, puisqu'il n'a plus son mot à dire.
À cela s'ajoute le problème de l'hébergement de l'enfant. Comme, généralement, c'est la mère qui obtient le droit de garde, le père n'a alors qu'un droit de visite et un droit d'hébergement : un week-end sur deux, lors des vacances scolaires... Le problème de cette disposition, c'est lorsque la mère ne remet pas l'enfant au père.
Dans cette situation, il y a normalement un risque judiciaire pour la mère, non?
En principe, oui. La réalité est différente. Car la plupart des plaintes posées par le père ne sont généralement pas poursuivies. Parfois, il faut déposer six ou sept plaintes avant que l'affaire fasse l'objet d'une poursuite. Et si une telle affaire arrive au niveau du tribunal, la peine est très rarement prononcée... Dans de telles circonstances, on peut imaginer qu'il y ait des situations extrêmes. Certains pères ne voient plus leurs enfants depuis des années. Ce qui a des répercussions terribles sur lui, évidemment, mais aussi sur les enfants. Les enfants ont besoin de leurs deux parents...
Dans le cadre d'un divorce par consentement mutuel, des arrangements ne sont pas possibles?
Si, évidemment. Mais dès qu'il y a un problème, ça se règle de nouveau devant le tribunal. Ce sont des situations difficiles. D'autant que l'enfant sert souvent de moyen de pression sur le père qui porte plainte. Si nous étions dans un autre système judiciaire, il y aurait moyen de le laisser à l'écart.
Un projet de loi réformant le divorce est prévu...
La question est de savoir si cette loi va améliorer la situation du père et de l'enfant. Je ne le pense pas. Par exemple, le projet de loi prévoit une autorité parentale conjointe, mais seulement si les deux parents sont d'accord. Pour nous, ce n'est pas suffisant. Cette autorité doit être automatique, car la plupart des divorces sont conflictuels. Autre point important : il n'y a pas d'amélioration du problème de la garde.
Vous n'hésitez pas à qualifier ce projet de loi de «dangereux». C'est un terme très fort. Pourquoi cette affirmation?
Ce projet crée des conditions tellement défavorables aux hommes... Si cette loi passe, elle aura un impact négatif sur le nombre de mariages dans ce pays. Elle créerait des situations où, matériellement, il ne sera plus possible pour un homme de divorcer. Imaginez qu'avec ce projet de loi, la pension alimentaire devient une sorte d'assurance vie pour l'épouse, puisque la pension serait calculée de sorte à maintenir le niveau de vie de l'ancien conjoint. C'est une injustice profonde...
Sans parler de la question du logement! Avec ce projet de loi, le conjoint ayant la garde de l'enfant, donc généralement la femme, peut utiliser l'appartement ou la maison du couple, jusqu'à ce que le dernier enfant ait atteint sa majorité. Et ce, même si le domicile est un bien propre de l'époux. À mes yeux, il s'agit d'une violation du droit à la propriété privée.
Quand on sait, en plus, qu'il y a actuellement une tendance au sein du gouvernement à inclure des droits à la pension dans ce projet de loi...
C'est-à-dire?
C'est-à-dire qu'en cas de divorce l'homme doit partager ses années de pension avec son épouse. C'est un peu lourd! Ce projet de loi est tellement injuste... Beaucoup d'hommes sont fatigués du système. On ne peut pas continuer comme ça. Nous sommes nombreux à penser la même chose : des limites sont aujourd'hui atteintes.
Le nom de votre association n'est-il pas un brin provocateur à l'égard des féministes?
Ça, c'est anodin. Nous ne sommes pas misogynes. Nous acceptons les femmes comme membres. Certaines sont même au comité. D'ailleurs, beaucoup de femmes sont solidaires avec nous. Il s'agit souvent de deuxième partenaire ou de grands-mères, qui sont elles aussi victimes de ces situations. Quand un père ne peut plus voir ses enfants, sa mère ne voit plus ses petits-enfants...
Bref, les femmes qui sont de notre côté sont celles qui sont ou ont été témoins de la souffrance infligée à certains pères.
Source :
http://www.le-quotidien.lu/edition/article.asp?ArticleId=8181